25 févr. 2012

L’aller-retour d’un fils prodigue chez les Témoins de Jéhovah


Voici un aperçu de ma petite vie, qui me paraît finalement quelque peu ordinaire. Pourquoi la raconterais-je ?

Peut-être pour expurger de mon cœur toutes les mauvaises choses qui s’y sont accumulées depuis l’enfance et qui ont rendu certains moments de mon existence insupportables, à commencer par mon éducation chez les Témoins de Jéhovah, que j’ai quittés par deux fois en une quarantaine d’années.

Ma mère orpheline de guerre 1914/18 à été élevée chez les sœurs de St C. Sa confiance en la religion a été déçue quand elle a pris connaissance des tarifs d’inscription scolaire pour ses 2 garçons. N’étant pas riche, elle a dit adieu à l’église et à ses croyances pour quelque temps.

Et puis un jour les Témoins de Jéhovah ont sonné à sa porte… voilà comment je me retrouvai à 6 ans à la salle du Royaume à écouter chaque semaine pendant des heures des discours et des explications que je ne comprenais pas et à étudier la bible , à un âge où l’on préfèrerait tout naturellement jouer avec ses petites voitures et son train électrique ou lire des bandes dessinées !

J'ai donc « grandi dans la vérité » comme disent les Témoins et j’ai été baptisé dans une baignoire au congrès de P., à 15 ans, sans trop comprendre ce qui m'arrivait ! La prédication, les petites allocutions à la tribune, ont rythmé mon adolescence jusqu’à mes 18 ans. Je me souviens de l’inquiétude qui était la mienne, la peur de la mort, d'Harmaguédon, d’avoir péché et de ne pas avoir fait suffisamment d’œuvres de prédication à la fin de chaque mois… Je pensais aussi que je ne serai pas accepté de Jéhovah au jugement dernier… Jeune homme dans la fleur de l’âge, je me suis marié à la salle du Royaume de R., certainement trop jeune et trop tôt, mais je désirais avant tout obéir aux commandements de Jéhovah en matière de chasteté.


Mais quelques années plus tard, ma jeune épouse et moi nous sommes « refroidis », et nous avons laissé tomber les réunions, la prédication et la congrégation, et par voie de conséquence notre divorce est survenu quelque temps après. J'ai été exclu en 1970, cinq ans après notre éloignement de la congrégation. Ma mère était encore Témoin à cette époque, elle s’est donc sentie obligée de me dénoncer aux anciens car je vivais dans son appartement avec une autre femme. Cela ne me fit ni chaud ni froid, car de toute façon je ne voulais pas retourner chez les Témoins.

Pianiste concertiste, ma nouvelle fiancée sortait tout juste d'une très forte dépression nerveuse, après avoir attenté plusieurs fois à ses jours. Sa famille, des amis à ma mère, avaient organisé notre rencontre, car ils avaient surtout vu en moi un gentil garçon qui pourrait la « sauver », la remettre sur les rails de la vie et du succès… ce que je compris à mes dépends bien plus tard…

Les années passant, une petite fille naquit de notre union, je n’étais donc pas préparé à ce qui m’attendait… J’avais prodigué à ma nouvelle épouse toute l’affection et l’amour dont je me sentais capable, entrepris des travaux d’envergure dans la maison pour assurer son bien-être et l’avait soutenu de toutes mes forces dans sa dépression, tant et si bien qu'elle réussit à retrouver son équilibre et son talent et redonna des concerts pour le plus grand bonheur d’un public de mélomanes avertis. Vivre dans son ombre ne me gênait pas, aussi me sentis-je complètement trahi quand elle m’annonça vouloir le divorce, pour retrouver la liberté de mouvement dont la privaient ‘les chaînes de notre mariage’… Il ne lui fallut pas longtemps pour prendre le bras d’un homme du monde du spectacle, monter à Paris et briller dans le milieu de la musique classique.

J’étais anéanti. J’aimais sincèrement cette femme. J’en suis venu à penser que de cette manière Jéhovah me punissait certainement d’avoir ‘abandonné ses voies’. A quoi bon continuer de vivre puisque Dieu m’avait rejeté et que je serais sans nul doute détruit à Harmaguédon, moi un incapable, un mécréant indigne d’être aimé ? Au plus profond de moi j'étais perdu d'avance et n'avais plus aucun espoir.

Je passai donc à l’acte, non sans une minutieuse préparation : lames de rasoir, puissant somnifère, et pour ne pas rater mon coup, le gaz. Le jour J, je me suis tailladé les veines du poignet, j'ai avalé le tube de cachets, j’ai débranché le tuyau de gaz et me suis mis à respirer profondément…

Je me réveillais dans une chambre d’hôpital, la nuit tombée. L’odeur du gaz avait alerté les voisins et les pompiers m'avaient retrouvé baignant dans mon sang… J’étais sauvé, malgré moi.

Aujourd'hui, je suis toujours hanté par le souvenir de cette tragédie, à laquelle m’avaient conduit les croyances inculquées dans ma jeunesse. Je remercie Dieu et son fils de m’avoir fait échapper à la mort et de m’avoir permis d’en ressortir plus fort. Mais le diable n’en avait pas encore terminé avec moi à ce moment-là.

Quelque temps plus tard je me remariai et ma femme nous donna un beau garçon, il y a de cela quelques vingt-cinq ans. Mais au fond de moi je me demandais parfois si Dieu existe vraiment. Les Témoins de Jéhovah frappaient à notre porte de temps en temps, mais je leur répondais que je n’étais pas intéressé. Jusqu'au jour où les guerres ont fait rage au Moyen-Orient et jusqu’à ce terrible attentat du 11 septembre 2001.  Je compris qu'il y avait une puissance du mal derrière l’horreur de ces évènements. Je me suis alors souvenu de tout ce que j'avais appris étant jeune, et j'ai pensé qu’on vivait précisément les derniers temps précédant Harmaguédon et que les Témoins de Jéhovah avaient raison !

En 2008 je fis les premiers pas de mon retour vers leur organisation. J’acceptai des exemplaires de Réveillez-Vous! et La Tour de Garde, puis j’assistais aux réunions, mais dans la semaine seulement, car ma démarche ne plaisait pas du tout à mon épouse, athée, et le Dimanche, c’est notre jour de sortie à la campagne. En outre, je me rends compte aujourd’hui que je l’ai véritablement harcelée au sujet de « la fin du monde », à un point tel qu’elle a même songé à divorcer malgré son amour sincère pour moi.

Toujours considéré comme un « exclu » de l’organisation, j’étais isolé, car personne n’avait le droit de m’adresser la parole aux réunions. Je devais arriver après le début de la réunion et en repartir avant la fin pour ne pas indisposer les assistants par ma présence. Je repensai alors au Fils prodigue de la parabole de Jésus qui avait été accueilli les bras ouverts par son père à son retour. Quel contraste avec ce que je ressentais au milieu des Témoins à présent !

J’avais été excommunié en 1970, depuis 45 ans, ne pouvait-il donc pas y avoir prescription ? Pourquoi Jéhovah semblait-il ne pas accepter ma repentance plus rapidement et hésiter à m’ouvrir ses bras ? J’ai commencé à me poser des questions et à avoir des doutes sur le bien-fondé de ce que j’entreprenais.

C’est mon épouse qui m’a finalement ouvert les yeux. Méfiante à l’égard des sectes, il ne lui fallut pas longtemps pour me produire une montagne de documents sur la véritable nature et les origines occultes de la Watchtower, autant de choses du passé à propos desquels les Témoins de Jéhovah sont complètement maintenus dans l’ignorance, comme le tombeau en forme de pyramide égyptienne de Russell et son emploi des symboles ésotériques issus de la franc- maçonnerie. Après de longs mois d’investigations sur les sectes et religions en tous genres, je découvris la vérité sur Russell, le juge Rutherford et leurs successeurs, ainsi que sur leur nature de « faux prophètes » (annonces pour 1914 et 1975 par exemple), grâce au livre "Crise de Conscience" écrit par un ancien dirigeant du « Collège Central ».

N’y avait-il donc aucune vraie foi sur terre ? Par bonheur, mes recherches m’amenèrent à entrer en contact avec des chrétiens sincères qui ont compris que l’appartenance à une organisation religieuse n’est qu’une forme de manipulation étrangère à la vraie foi, qui doit se vivre sur un plan personnel, dans une relation d’intimité avec Dieu. C’est là le véritable sens de la liberté chrétienne à laquelle Christ nous a appelés :

“ Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples ; vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres. ” (Jean 8:31-32)

“ Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qui s'y trouve, lui qui est le Seigneur du ciel et de la terre, n'habite pas dans des sanctuaires fabriqués par des mains humaines ; il n'est pas servi par des mains humaines, comme s'il avait besoin de quoi que ce soit : c'est lui qui donne à tous la vie, le souffle et toutes choses. D'un seul être il a fait toutes les nations des humains, pour que ceux-ci habitent sur toute la surface de la terre, dans les temps fixés et les limites qu'il a institués, afin qu'ils cherchent Dieu, si tant est qu'on puisse le trouver en tâtonnant. Pourtant il n'est pas loin de chacun de nous. ” (Actes 17:24-27)

Je découvris aussi la véritable espérance qu’on m’avait cachée depuis l’enfance :

“ Que votre cœur ne se trouble point. Croyez en Dieu, et croyez en moi. Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. Si cela n'était pas, je vous l'aurais dit. Je vais vous préparer une place. Et, lorsque je m'en serai allé, et que je vous aurai préparé une place, je reviendrai, et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis vous y soyez aussi. Vous savez où je vais, et vous en savez le chemin. ” (Jean 14:1-4)


Aujourd’hui, je continue jour après jour de me laisser enseigner par la Parole de Dieu, même quand cela remet en question des croyances qu’on m’a inculquées depuis tout petit. C’est pour moi un indicible soulagement de ressentir qu’après m’avoir permis de traverser ces épreuves, Yahweh m’a appelé à lui. Je ne souffre plus dans mon esprit comme c’était le cas lorsque je m’efforçais de réintégrer l’organisation des Témoins de Jéhovah. Je sais que, parmi les Témoins, de nombreux frères et sœurs sont conscients d’être dans une bulle de verre dont ils ne peuvent s’échapper sous peine de briser leurs liens familiaux et sociaux, et je suis malheureux pour eux.

Je remercie mon épouse d’avoir tenu bon à mes côtés et de m’avoir montré là où je ne devais pas retourner. La paix est revenue dans notre foyer, je pense que Christ a exaucé mes prières en ce sens.

Jésus a dit : « Demandez et on vous donnera, frappez et l'on vous ouvrira ! »  et aussi : « Ne soyez pas inquiet ! Croyez en Dieu, et croyez aussi en moi ! »  (Luc 11:9 ; Jean 14 : 1).

Merci Seigneur de m'avoir entendu et de m'avoir indiqué le chemin ! Et aussi d'avoir ôté toute mon inquiétude !

« Maintenant donc, il n'y a plus de condamnation pour ceux qui sont unis à Christ ! » - Romains 8:1

Votre frère, un humble chrétien.

D. M.

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